National Library of Israel, Wahrman Collection, Palestine in 1911 865145 m2682084 006r - Pool of Bethesda -
Le 9 mai 2024, Auvergne
Jean 5:1-9
Après cela, il y eut une fête juive, et Jésus monta à Jérusalem.
Or, à Jérusalem, près de la porte des Brebis, il existe une piscine qu’on appelle en hébreu Bethzatha. Elle a cinq colonnades,
sous lesquelles étaient couchés une foule de malades, aveugles, boiteux et impotents. [ 3b- 4]
Il y avait là un homme qui était malade depuis trente-huit ans.
Jésus, le voyant couché là, et apprenant qu’il était dans cet état depuis longtemps, lui dit : « Veux-tu être guéri ? »
Le malade lui répondit : « Seigneur, je n’ai personne pour me plonger dans la piscine au moment où l’eau bouillonne ; et pendant que j’y vais, un autre descend avant moi. »
Jésus lui dit : « Lève-toi, prends ton brancard, et marche. »
Et aussitôt l’homme fut guéri. Il prit son brancard : il marchait ! Or, ce jour-là était un jour de sabbat
Une piscine pas comme les autres.
A priori cette histoire de la piscine m’interpelle car ce qui me vient à l’idée, c’est l’Inde et le Gange où les gens vont se baigner : je suis frappée par l’universalité de cette pratique, qui est la purification religieuse liée aussi à la guérison, (évidemment, pour beaucoup de catholiques, c’est Lourdes qui doit venir à l’esprit). La première chose que j’ai donc fait c’est de me renseigner sur ce lieu et sur cette piscine où Jésus était venu guérir et j’ai trouvé des informations qui m’ont surprises. J’ai découvert que des fouilles archéologiques confirmait bien le lieu de cette piscine mais que sa valeur religieuse était suspecte, dans le sens qu’elle se trouvait dans un lieu d’un ancien temple païen : « la piscine de Béthesda était, en partie du moins, un grand temple-hôpital païen, consacré au dieu Esculape, avec ses médecins sacerdotes et l'observance de son culte » ( RELIGION. (1965). The Bulletin of the American Society of Papyrologists, 3(1), 21–24. http://www.jstor.org/stable/24518521). En tout cas il semble bien que le lieu soit devenu, à l’époque de Jésus, un lieu qui avait l’aval tacite des autorités juives, (on pourrait dire judaïsé en quelque sorte) et où venaient de nombreuses personnes en quête de guérison.
J’en viens maintenant au texte
Après cela, il y eut une fête juive, et Jésus monta à Jérusalem.
Or, à Jérusalem, près de la porte des Brebis, il existe une piscine qu’on appelle en hébreu Bethzatha. Elle a cinq colonnades,
sous lesquelles étaient couchés une foule de malades, aveugles, boiteux et impotents.
On retrouve Jésus à Jérusalem, ainsi que la raison de sa présence, et comme toujours, les indications qui permettraient de dater cet événement sont très floues et nous laissent sur notre faim nous qui avons du mal à croire en la réalité de faits qui ne sont pas datés avec précision… Par contre le lieu est décrit avec précision et il doit s’adresser à des personnes qui ne le connaissaient pas, car l’auteur nous explique bien où il se trouvait, « la porte des brebis » et « les cinq portiques » et surtout ce qu’on y faisait ( il a été localisé avec les fouilles archéologiques ) et on peut facilement imaginer la scène plutôt rebutante de cette foule de malades allongés, gémissant … Il est naturel de penser que c’était un choix délibéré de Jésus d’aller ou de passer par ce lieu, mais sa présence n’en est pas expliqué pour autant : il est là voilà tout.
Il y avait là un homme qui était malade depuis trente-huit ans. Jésus, le voyant couché là, et apprenant qu’il était dans cet état depuis longtemps, lui dit : « Veux-tu être guéri ? »
Autre précision qui nous est donnée, celle de la longueur de la maladie d’un homme dont le nom ne nous est pourtant pas mentionné et que Jésus a priori rencontre pour la première fois, le définissant tout entier au début par sa condition de malade .
Le malade lui répondit : « Seigneur, je n’ai personne pour me plonger dans la piscine au moment où l’eau bouillonne ; et pendant que j’y vais, un autre descend avant moi. »
La question de Jésus ( veux-tu être guérir) qui paraît tout d’abord étonnante car la réponse semble évidente, est une entrée en matière qui permet de transformer ce malade passif à qui on viendrait faire la charité en une personne à part entière, autonome, maître de son destin : elle lui redonne sa dignité. Sa réponse en tout cas nous laisse deviner que non seulement il était malade mais n’avait aucune ressource humaine ni financière.
Jésus lui dit : « Lève-toi, prends ton brancard, et marche. »
Et aussitôt l’homme fut guéri. Il prit son brancard : il marchait ! Or, ce jour-là était un jour de sabbat
On retrouve alors cette belle formule utilisée par Jésus dans les autres évangiles quand il guérit un paralysé... « lève-toi … et marche » et ce n’est que tout à la fin qu’il nous est rapporté que c’était un jour de sabbat, ce qui introduit le thème de la polémique que cette guérison suscite mais pour l’instant c’est cette guérison miraculeuse qui est au centre du récit.
* * *
Ce que j’en retiens…
C’est d’abord ce lieu semi-païen, toléré par les autorités juives où se bousculaient les nombreux malades désespérés en quête de guérison car comme je l’ai noté au début on trouve des lieux similaires dans le monde entier … on a envie de regarder ces lieux avec un certain scepticisme, fréquenté par des gens quelque peu superstitieux dont les témoignages ne sont pas très fiables ... mais la description qui y est faite dans le texte est neutre et on ne trouve ni de la part du rédacteur ni de celle de Jésus, de jugement ou de critique.
(alors aujourd’hui la Science ( avec un grand S) attribue des propriété curatives à de nombreuses sources d’eau, où les gens affluent pour y faire des cures mais elles ne sont certainement pas gratuites...)
La présence de Jésus à cet endroit, et sa question au malade montre en tout cas, un Jésus qui est plus préoccupé par le désir du malade d’être guéri que par une orthodoxie religieuse quelconque ce qui est rassurant car bien souvent c’est tout le contraire de ce que beaucoup d’églises enseignent : pour que ça marche, et que Dieu guérisse, il faut prier de telle manière, avec de tels mots, en faisant de tels gestes, dans tel lieu ou à travers telle ou telle personne.. ( ce qui me fait penser que nous avons tous tendance à vouloir être des apprentis sorciers : nous désirons nous approprier le pouvoir de Dieu et cherchons à découvrir le « truc » infaillible pour que le miracle se produise)
Jésus guérit où il veut, quand il veut ( même le jour du sabbat) et comme il veut...
La guérison est une grâce...jamais un dû.