le 21 juin, 2021, Auvergne
(temps orageux, élections régionales et départementales hier avec un nombre record d’abstentions)
Il est temps de me dévoiler
Pourquoi cette étude de l’évangile de Marc ?
Régulièrement, j’ai besoin de réexaminer ma foi… de me demander qui est Dieu, qui est ou était Jésus Christ. Ce n’est pas vraiment que je passe par une crise profonde où je remette tout en cause, mais qu’après un certain temps, j’ai l’impression qu’au-dessus de cette foi première, originelle que je professe, se sont accumulés des couches de sédiments qui la recouvrent et m’empêchent de la voir telle qu’elle est, ou telle qu’elle devrait être…
Cette fois-ci, j’ai décidé d’étudier à fond l’évangile de Marc parce que tout le monde dit ( bon tout le monde ou presque) que c’est le plus ancien, et le plus proche du « Jésus historique », en tout cas, c’est le plus factuel, le plus brut, écrit semble-t-il avant que les disciples de Jésus et leurs émules aient eu le temps de développer une théologie ou une doctrine bien ficelée à partir de ses faits et gestes et des événements qui ont entouré sa vie, mais surtout peut-être à partir de ce qu’il a pu dire et enseigner.
(Cependant, le texte de l’évangile de Marc que l’on pensait, justement un peu brut, a vu un regain d’intérêt dans les dernières décennies et maintenant certains détectent dans la rédaction de cet évangile un dessein bien précis, une volonté consciente de présenter la vie, la mission et les enseignements de Jésus dans un but apologétique défini)
Peu importe, ou tant mieux, ma démarche énoncée plus haut, en tout cas est la raison pour laquelle j’ai choisi de le lire et de l’étudier
Comment j’aborde le texte.
Quand je lis les textes évangéliques, je suis consciente du fait qu’ ils sont le résultat d’un travail de mémoire de toute une communauté qui a voulu garder farouchement et fidèlement le souvenir de Jésus , l’objet de toute leur affection et leur vénération. A tous ces témoins femmes et hommes, anonymes pour beaucoup et dont on ne peut retrouver la trace, je suis profondément reconnaissante : c’est grâce à eux que ces textes précieux ont pu arriver jusqu’à nous.
Je suis aussi reconnaissante envers toutes ces communautés de témoins qui existent encore aujourd’hui et qui se sont emparées du message de l’évangile et l’on fait leur pour guider leur vie. Moi qui ait eu le privilège de vivre et collaborer étroitement pendant de nombreuses années, avec des communautés chrétiennes diverses et variées, en Amérique du Sud, en Afrique de l’Est mais aussi en Amérique du Nord et en Europe, j’ai eu l’occasion de découvrir un nouveau sens à des textes que la culture européenne occidentale m’avait empêchée de déceler. Particulièrement dans les milieux douloureux de pauvreté, de violence extrême et aussi de persécution, ces textes évangéliques qui pour certains ont été élaborés pour des communautés vivant dans des conditions similaires à celles-là, se sont révélés être une source de réconfort inattendu mais aussi de significations insoupçonnées . Ils ont renouvelé ma lecture et ont élargi le champ de ma compréhension.
Comme sil s’agit bien d’une démarche personnelle, j’aborde le texte avec ma formation en littérature et en linguistique. Naturellement, ma lecture est influencée par mes connaissances sur le sujet et je vais être attentive à des aspects du texte qui ont à voir avec son intentionnalité, son lectorat/auditoire en plus de sa structure, comme je le ferai pour n’importe quelle autre œuvre. Je ne peux m’empêcher instinctivement de faire une analyse de ce que je lis à la lumière des théories littéraires qui me sont familières sachant, qu’un texte biblique n’est pas « tombé du ciel ». Inspiré certainement, il a aussi une vraie histoire que l’on peut très bien essayer de tracer.
(Je dois avouer que je cherche d’un certain côté, aussi à me faire plaisir... Je me fais plaisir en faisant des recherches sur les questions qui m’interpellent et en réagissant quand je trouve des arguments sur des polémiques d’églises auxquelles j’ai dû faire face)
Cependant, je connais aussi les limites de mes connaissances : je ne suis pas habilitée à faire une exégèse sérieuse du texte de l’évangile de Marc n’ayant même pas une connaissance basique du grec ni de l’araméen et autres langues qui ont servi de support à son élaboration (et si j’ai fait 6 ans de latin je dois dire que j’étais nulle et quand j’ai eu des bonnes notes à mes devoirs, c’est parce que ma mère qui elle adorait le latin, m’avait aidé à les faire). Je connais bien donc l’inanité de certaines remarques basées sur la valeur d’un mot isolé ou d’une structure grammaticale sachant qu’on a à faire à un texte rapporté et traduit et que les théories de communication nous enseignent qu’il y a bien d’autres éléments en dehors de la langue qui entrent en jeu dans la compréhension d’un message.
Pour cette raison, quand je me pose des questions sur certains aspects de ma lecture, je cherche des articles d’exégètes reconnus pour trouver des réponses. J’ai été surprise par le nombre incalculable qui existe pour n’importe quel passage ou même n’importe quel petit bout de phrase de rien du tout qui me semblait totalement insignifiant. Si j’apprends beaucoup, à mon enthousiasme du début, a succédé une certaine déception quand je me suis rendu compte que de tout scientifique qu’ils étaient, leurs auteurs n’en étaient pas neutres pour autant. J’ai, je dois l’avouer, un certain malin plaisir à discerner dans leur rédaction quels enjeux peuvent se dissimuler derrière les possibles interprétations et même traductions qu’ils proposent. On n’est jamais aussi objectif que l’on veut le croire.
Lecture au quotidien
J’ai voulu ancrer cette lecture d’un texte écrit il y a plus de 2000 ans dans mon quotidien ce qui fait que je note la date et le lieu où je me trouve quand je le commente. Je ne crois pas que malgré tous les efforts que l’on fasse, on n’ait jamais un regard objectif face à un texte quel qu’il soit mais particulièrement un texte religieux aussi connu qu’un évangile. On le lit à travers un nombre considérable d’expériences de toutes sortes dont on est plus ou moins conscient. L’objectivité est une illusion et c’est foncièrement malhonnête mais aussi arrogant de faire semblant d’être neutre, indifférent, ou impartial et détenteur d’une vérité absolue sur ce genre de texte.
Les textes bibliques : un trésor inépuisable
Dire que la bible fait partie du patrimoine de l’humanité comme l’a décrété l’Unesco n’est pas en ce qui me concerne, une expression vide de sens ou une belle formule convenue: les trésors littéraires, anthropologiques, philosophiques et théologiques, que l’on y trouve sont pour moi une source inépuisable d’enthousiasme et de découverte.
Mais en plus je crois que ces textes sont inspirés : s’ils sont arrivées jusqu’à nous, et c’est je crois, à cause de la volonté délibérée de Dieu de communiquer avec nous, ses enfants. Inspiration veut donc autant dire, qu’il a choisi des hommes et des femmes (oui des femmes aussi) pour être ses écrivains, mais aussi qu’il a inspiré ceux qui ont décidé de garder, les oracles et les écrits rassemblés à travers la longue histoire du peuple juif. C’est dans l’ histoire de la transmission de ces textes que je vois le plus l’intervention divine.
En ce qui concerne l’évangile de Marc, je pense que c’est un texte authentique écrit avec intégrité qui a été transmis par des personnes qui cherchaient à être fidèles à ce qu’ils avaient vu et entendu et auquel on peut faire confiance : son historicité n’est plus à démontrer. Mais malgré toutes les recherches que l’on fera, on ne pourra jamais avoir de certitudes sur « les paroles du Jésus historique » ( on est trop éloigné des faits) et donc je crois, et j’insiste sur le je crois, que Dieu est intervenu pour que le texte que l’on a reflète fidèlement les paroles. le message, et la personnalité de celui qui y est appelé « fils de Dieu ». Je ne crois pas en un Dieu qui joue à cache-cache et chercherait à nous tromper.
Ma conviction est aussi que le sens du message transmis dans l’évangile est accessible à tous : ce serait injuste si seuls les érudits pouvaient bien le comprendre, surtout quand il n’y a jamais de consensus entre eux. Je crois que l’Esprit de Dieu qui est actif aujourd’hui permet à n’importe quelle personne, d’où qu’elle soit et quelque soit son niveau d’études d’y rencontrer Jésus et de comprendre son message.
Un héritage que je veux transmettre
Et puis finalement, pour retourner une fois de plus à cette question de démarche personnelle, ce qui me vient à l’esprit ce sont ces paroles de cette fable de la Fontaine :
Un riche Laboureur, sentant sa mort prochaine,
Fit venir ses enfants, leur parla sans témoins.
Gardez-vous, leur dit-il, de vendre l’héritage
Que nous ont laissé nos parents.
Un trésor est caché dedans.
En réalité, si j’ai échappé à la Covid 19, sachant que chaque jour qui passe rend la mort plus prochaine, l’héritage que je veux laisser à mes descendants directs et indirects, membres de ma famille dans le sens étroit ou large du terme (comme l’a redéfini Jésus) ou tout autre personne qui veuille le recevoir, c’est ce trésor qu’est ma foi en Jésus Christ avec tous ses questionnements, toutes ses difficultés et toutes ses joies. Quoi de mieux que de le faire en partageant mes réflexions et mes interrogations à propos de ce Jésus du texte de l’évangile de Marc pour que chacun puisse répondre à la question qu'il a posé à Pierre :
et toi qui dis-tu que je suis ?