19 Mai 2021, Auvergne, France où il fait encore froid!
Toujours pas de cessez-le feu … les attaques continuent de part et d’autre et les morts s’accumulent … les réseaux sociaux s’enflamment. J’évite d’aller sur les sites qui vont justifier les actions d’Israël à coup de textes bibliques..et ceux qui vont plaider la cause palestinienne à l’aide de formules emporte-pièce. Comme disait un archevêque maronite palestinien, Elias Chacour, ceux qui n’habitent pas dans la région ne font qu’envenimer les choses car ils ne connaissent pas la complexité de la situation sur place….ils rendent le travail plus difficile pour ceux qui œuvrent pour la paix.
Pendant ce temps-là il y a deux mille ans,
Le refus
Au cœur de Jérusalem, après avoir chassé violemment les marchands du temple Jésus y revient pour enseigner …. et cette fois-ci il se retrouve face à une véritable délégation représentant les autorités religieuses de Jérusalem car on nous dit bien « les principaux sacrificateurs, les scribes et les anciens, vinrent à lui » Après l’esclandre qu’il a causé, il n’y a rien de très étonnant
Ils se rendirent de nouveau à Jérusalem, et, pendant que Jésus se promenait dans le temple, les principaux sacrificateurs, les scribes et les anciens, vinrent à lui,
et lui dirent: Par quelle autorité fais-tu ces choses, et qui t'a donné l'autorité de les faire?
Jésus leur répondit: Je vous adresserai aussi une question; répondez-moi, et je vous dirai par quelle autorité je fais ces choses.
Le baptême de Jean venait-il du ciel, ou des hommes? Répondez-moi.
Mais ils raisonnèrent ainsi entre eux: Si nous répondons: Du ciel, il dira: Pourquoi donc n'avez-vous pas cru en lui?
Et si nous répondons: Des hommes... Ils craignaient le peuple, car tous tenaient réellement Jean pour un prophète.
Alors ils répondirent à Jésus: Nous ne savons. Et Jésus leur dit: Moi non plus, je ne vous dirai pas par quelle autorité je fais ces choses.
Pourtant, jusqu`à présent, Jésus ne s’est pas proclamé le Messie mais on a dit que ses actes en étaient une proclamation : d’abord son entrée sur un ânon, où il a reçu les acclamations de la foule et ensuite, son acte de chasser les vendeurs du temple « sa maison ». Les autorités religieuses sises à Jérusalem sont certainement conscientes de la signification de ses faits et gestes dont ils ont dû être informés, ( ils avaient très probablement des informateurs) surtout de l’engouement de la foule qui l’a appelé fils de David ... pourtant Lui ( en tout cas dans ce récit évangélique) ne s’autoproclame pas le Messie, ni se donne pas non plus le titre de « fils de David », mais il laisse dire...
Ce que lui demandent donc les anciens c’est de décliner son identité clairement, c’est de répondre finalement à la question qu’il a posé lui-même à ses disciples: qui dites vous que je suis à laquelle Pierre avait répondu par la fameuse déclaration, « tu es le Messie »
Par quelle autorité fais-tu ces choses, et qui t'a donné l'autorité de les faire?
Leur question est bien sûr légitime : son autorité, elle ne venait pas d’eux ni d’aucun autre corps religieux reconnu, Jésus n’a pas de légitimité à proprement parler à part celle que lui donne ses disciples et la foule qui le suit et l’acclame. Évidemment, il y a les guérisons et les expulsions de démons dont ils ont entendu parler mais qu’ils n’ont pas nécessairement observé et d’ailleurs, il avait été accusé à un moment donné de tenir son autorité du malin ce qu’il avait réfuté catégoriquement.
(En lisant cela, je ne peux pas m’empêcher de penser à quel point cette attitude est encore réelle aujourd’hui. Quand un nouveau prédicateur fait son apparition, surtout s’il attire les foules, il est normal que les autorités religieuses quelque soit la tradition chrétienne à laquelle ils appartiennent, veuillent venir s’enquérir de qui il est à savoir s’il est un électron libre, un prophète autoproclamé, ou s’il est rattaché à une organisation chrétienne de bonne réputation. Évidemment, nous qui savons qui était Jésus, on a du mal à se rendre compte de ce que cette démarche pouvait avoir de normal et on a tendance à voir du « surnaturel » dans une attitude compréhensible qui pourtant atteste une fois de plus l’authenticité du récit évangélique. Oui, Jésus est unique et son histoire l’est aussi mais elle ne s’inscrit pas pour autant dans un monde fantasmagorique en dehors des composantes de toute réalité socio-culturelle)
Comme on l’a vu précédemment dans ses échanges avec ses interlocuteurs, Jésus répond souvent aux questions en en posant une autre, une stratégie qui lui permet de révéler les intentions de celui qui l’interroge. Mais cette fois-ci la question a un autre but…elle est de piéger ses interlocuteurs !
Jésus leur répondit: Je vous adresserai aussi une question; répondez-moi, et je vous dirai par quelle autorité je fais ces choses.
Le baptême de Jean venait-il du ciel, ou des hommes? Répondez-moi.
Mais ils raisonnèrent ainsi entre eux: Si nous répondons: Du ciel, il dira: Pourquoi donc n'avez-vous pas cru en lui?
Jésus fait preuve d’ une grande habileté en leur tendant un piège ce que l’évangéliste prend soin d’expliquer au lecteur/auditeur qui n’est pas censé connaître le contexte dans lequel se déroule l’échange. Revient donc sur la scène Jean Baptiste dont il est question au début et que l’on sait mort décapité mais dont on découvre ou redécouvre encore la popularité. Intéressant historiquement parlant pour le moins de savoir combien Jean Baptiste était toujours populaire après sa mort mais dont le lecteur auditeur de l’époque n’aurait pu se douter plusieurs décennies après la mort et Résurrection de Jésus.
Les autorités qui sont venues interroger Jésus ne sont pas des imbéciles…et ne tombent pas dans le piège qui leur est tendu, mais malgré tout ils sont acculés à une réponse humiliante en disant qu’ils ne savent pas la réponse et Jésus lui marque quand même un point !
Peut-être le plus intrigant de cet échange est la réponse de Jésus qui refuse de s’identifier clairement devant eux !
Et Jésus leur dit: Moi non plus, je ne vous dirai pas par quelle autorité je fais ces choses.
A priori, ce refus de Jésus de s’identifier est un tel contraste avec le Jésus de l’évangile de Jean qui passe son temps à dire qui il est qu’on se demande s’il s’agit du même Jésus.... Évidement ceux qui lui posent la question de qui il est, ne sont pas ceux qui veulent le connaître ou le suivre mais cherchent à le condamner, il est donc compréhensible qu’il ne veuille partager avec eux le secret de son identité car ne serait-ce comme jeter des perles aux pourceaux qui se retourneraient après contre lui ?
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En tout cas, pour moi qui suis en train de lire des livres sur la contemplation et le mysticisme, d’une certaine manière je suis contente de voir que ce Jésus de Marc n’est pas le Jésus des mystiques, des contemplatifs au sens traditionnel du terme : il est trop vindicatif pour ça...c’est le Jésus des actifs, de ceux qui vivent dans les tranchées, et doivent faire face à l’hostilité d’adversaires tenaces … pour ceux-là, le Jésus de Marc qui ne baisse pas la tête est réconfortant, proche, accessible mais aussi dérangeant à souhait.
P.S : on est le 20 mai maintenant : cessez-le-feu en Israël dit-on... serait-il possible que ce soit vrai ?