Washington DC. Le 20 mars, dans l’autocar…
En vrac,
( Les cerisiers sont en fleurs, même dans ce park, mal entretenu, en plein milieu de la ville : le printemps offre sa beauté à tous et à toutes, indifférent au milieu dans lequel il se trouve)
Première fois que je reprends des transports en commun… évidemment la compagnie assure que toutes les précautions sont prises pour lutter contre le Covid-19...masques obligatoires, un siège sur deux occupé, ( dans cette ligne, de toutes façons, cet autocar est toujours vide aux 3/4) aération…
Avant d’arriver à la gare routière, je vois se profiler la coupole du Capitole où se sont passés les événements du 6 janvier. De là, je ne vois pas le périmètre de protection qui l’entoure avec les militaires autour...
Au départ,.. moins de 10 personnes, des étudiants semblent-ils ( c’est fou comme il est facile de situer les gens , par leur manière de s’habiller, de se tenir où même leurs sacs à dos) étant donné qu’il dessert les Universités de la Virginie. Pas d’ouvriers sur cette ligne...
Le chauffeur, un homme d’environ 60 ans qui a dû passer la nuit dans le car ou tout au moins piquait un somme et qui ouvre les portes après qu’une employée frappe à sa porte… a un masque … et vérifie tout avant de me laisser entrer….( je me demande si lui a été vacciné… je suppose que oui à grâce à son travail...appartenant à la communauté afro-américaine qui se méfie des plans de santé gouvernementaux je ne sais s’il a été réticent et ou si c’est obligatoire pour travailler dans cette entreprise)
(À propos du coronavirus, où voulez-vous partir en voyage a demandé le professeur l’autre jour, sur l’écran de l’ordinateur où des enfants de 5 ans essaient de suivre leur cours...chacun chez eux…. Ma petite fille appuie sur l’icône « unmute » de son ordinateur et répond : dans un pays où il n’y a pas le coronavirus….comme quoi les enfants...)
La veille,
Dans le quartier, il y a eu devant une école fermée, une distribution de nourriture gratuite : dans un grand sac en plastique, on y voyait et c’est ce qui m’a étonné, des produits de qualité : bouteille de lait, vrai beurre, fruit, légumes. On m’en a proposé un… et moi qui promenais mes petits-enfants j’ai d’abord refusé. Étant surprise que l’on me le propose et sachant qu’on n’en avait pas besoin…mais je me suis sentie mal à l’aise quand même ( c’était deux jeunes qui faisaient la distribution et demandaient l’adresse et le nom des personnes auxquelles ils donnaient ces denrées) une manière de dire….mais je ne suis pas pauvre moi !
(je dois avouer quand même que quand j’ai vu ce morceau de beurre et que je savais qu’il n’y en avait plus dans le frigidaire, j’en ai eu envie!)
Mais ça n’en est pas resté là…
À côté de moi, il y avait une vieille dame du quartier qui marchait avec une canne et à qui on a donné aussi un de ces grands sacs...alors que j’expliquais que je n’étais pas du quartier, que je n’étais que de passage etc...elle a dit aux jeunes de m’en donner un, et m’a sommé de le prendre … tout le monde a le droit d’en avoir un dans sa rue à elle, et en plus on ne refuse pas de la nourriture gratuite ! Elle a ajouté que je pouvais donner les denrées à un des voisins qui en voudraient certainement…
On a parlé et elle m’a montré où elle habitait dans cette rue, anciennement presque peuplée à 100 % par la communauté afro-américaine comme beaucoup de quartiers de la ville de Washington. Ces 20 dernières années, le phénomène de gentrification a fait que d’anciennes maisons en mauvais état que les propriétaires avaient du mal à entretenir ou qui étaient endettés ont été rachetées pour une bouchée de pain par des sociétés immobilières qui les ont démolies et ont construit des petits immeuble avec 2 ou 3 appartements à leur place...D’autres, ont été aménagées par des propriétaires plus fortunés...ceux qui n’ont pas besoin qu’on leur donne de nourriture gratuite parce qu’ils en ont assez...
(Il semble que la distribution de nourriture était organisée par une association de l’école pour les habitants du quartier)
Finalement, j’ai donc accepté les denrées mais me suis sentie une fois de plus mal à l’aise quand on m’a demandé à moi cette fois-ci mon nom et l’adresse...(certainement pour des raisons légitimes) et j’ai été les remettre aux voisins d’Amérique latine du sous-sol ( où on entendait de la musique, les autres locataires étant absent) en leur signalant qu’il y avait une distribution de nourriture. Je doute qu’ils y soient allés car ils sont méfiants n’ayant peut-être pas leurs papiers en règle, je peux imaginer que ça leur ferait peur de donner leur identité.
D’un côté de la rue, une communauté noire, citoyens du pays mais avec toutes les discriminations que l’on connaît et de l’autre, une communauté d’Amérique latine qui elle vit cachée parce que sans papiers…et ici et là...d’autres encore dont peu s’implantent de manière permanente. Avec la pandémie, et le télétravail, vivre à Washington même pour limiter les déplacements, n’est plus autant un atout...et tout autour beaucoup de restaurants ont fermé, alors qui sait ce que ce quartier qui était en plein essor deviendra...
Il y a toute sorte de pauvreté en tout cas même si le mot pauvre ne colle pas...pour décrire ni les uns, ni les autres...ils ne ressemblent d'aucune manière à ses êtres déshumanisés... que l'on le voit sur ses images dont on nous bombarde à la TV pour que l’on contribue à des projets dans des pays que l'on ne connaît pas…
Donner et recevoir…
Moi. Je n’en ai pas besoin, donnez-le aux autres :
Attitude qui paraît altruiste mais ne l’est pas du tout ; une manière de dire, je ne fais pas partie de ceux-là…pour qui me prenez-vous?
Rien de plus humiliant par certains côtés que d’être obligé d’accepter de la nourriture...(quand on se croit mieux que cela…)
Bienheureux les pauvres en esprit dit Jésus….
Tant pour celui qui donne que celui qui reçoit...
Me voilà corrigée !
P.S Partager, par contre, c’est tout autre chose, tout le monde est gagnant : combien de pains et de poissons avez-vous demanda Jésus aux disciples avant de faire le miracle de la multiplication des pains…